Helena Noguerra : “Quand je chante, c’est la jouissance suprême”
Entretien. Actrice, auteure de livres, réalisatrice, chanteuse… Helena
Noguerra passe d’un genre à l’autre avec talent, légèreté, espièglerie
et humour. En témoigne son très réussi nouvel album “Nue”, hommage à la
bossa nova aux influences sixties et à la nouvelle vague de la musique
brésilienne, qu’elle dévoilera en mai au Théâtre Les Etoiles à Paris.
Helena Noguerra se voit comme une chanteuse «qui joue» et non comme
une actrice qui chante. Cela lui permet d’être libre dans sa musique à
l’esprit espiègle en passant d’un genre à l’autre, du cinéma à la
chanson, l’écriture d’un livre ou la réalisation d’un film avec un même
plaisir. “Tout ça c’est le même terrain, ce sont des vases communicants.
On interprète, mais effectivement quand je chante, c’est la jouissance
suprême” confie celle qui revient avec “Nue”, son sixième opus. Un album
réalisé avec la complicité du musicien Philippe Eveno, aux douces
ambiances de bossa nova, hommage aux sixties et à la nouvelle vague de
la musique brésilienne.
Interprète sensuelle et solaire, elle invite à un voyage musical où
le jazz n’est jamais loin. Avec en prime un duo teinté d’humour avec
Vincent Dedienne (“Je mens“), une reprise de “J’entends cette musique”,
chanson écrite en 1963 de Robert Gall et de Rémo Giazotto, inspirée de
l’Adagio d’Albinoni, qui fut interprétée par France Gall. Le tout
accompagné d’un morceau disco aux accents comiques où elle se transforme
en reine de la piste et en queen des dancefloors. Un disque très réussi
mêlé de légèreté et de mélancolie, qui reflète bien la personnalité de
la chanteuse. Elle le dévoilera au théâtre Les Etoiles à Paris le 15
mai, avant un retour sur scène à partir d’avril 2020 dans un spectacle
musical écrit avec Pierre Notte, où elle revisitera ses chansons depuis
ses débuts.
Qu’aimez-vous de la bossa nova, dont vous vous êtes inspirée pour votre album ?
Helena Noguerra : C’est une musique qui n’est pas
d’aujourd’hui et qui en même temps est intemporelle, comme le jazz.
Toutes les musiques perdurent finalement. Quand j’étais petite, mes
parents en écoutaient beaucoup. J’aime cette musique qui doit me
correspondre, j’imagine, où je retrouve des choses qui me vont bien, à
travers une forme de légèreté. C’est une musique savante, bien qu’elle
ait l’air légère parcourue de textes plutôt naïfs qui parlent de l’amour
avec des métaphores comme la mer, les oiseaux qui chantent, le soleil
qui brille, l’aurore qui se lève sur l’horizon et qui en même temps est
plutôt mélancolique et nostalgique. Il y a quelque chose dans cette
musicalité qui me plaît, me ressemble.
Vous n’aviez pas sorti de disque depuis “Année zéro” en
2013. Est-ce votre expérience au sein du spectacle musical Les
Parisiennes, l’année dernière (avec Arielle Dombasle, Mareva Galanter et
Inna Modja) qui vous a redonné goût à la chanson ?
Helena Noguerra : Non pas du tout. En fait, la
chanson n’est jamais abandonnée. Entre-temps, j’ai tourné pendant deux
ans avec Natalie Dessay, Agnès Jaoui et Liat Cohen dans “Paris Rio”, un
spectacle de reprises de bossa nova, ensuite effectivement il y a eu Les
Parisiennes. Il y a des tas de projets, les films, les séries. Comme je
suis un peu boulimique, les activités se sont multipliées. A 30 ans, je
n’étais plutôt que musicienne, puis j’ai commencé à tourner et j’ai eu
du succès comme comédienne, après j’ai écrit des livres. Mais, je
travaille tout le temps mes chansons en parallèle.
Que mettez-vous derrière le titre “Nue” ?
Helena Noguerra : J’ai voulu ce titre d’album qui
traduit cette envie de dépouillement, de ne rien porter, comme une
espèce de remise à zéro. Je crois que c’est important d’être conscient,
de se dépouiller. Il faut aller vers la décroissance heureuse, plus de
marques, pas de bijoux, pas de sophistication. Il faut se rapprocher de
la vie, de ce qu’est la nature, l’essence des choses pour sauver la
planète, l’être humain, pour arrêter de consommer comme des idiots.
Votre registre est plein d’humour. A l’image du titre d’ouverture où vous chantez “Je ne t’aime pas“…
Helena Noguerra : Pour moi, c’est une déclaration
d’amour “retournée” (rires). Il y a un côté jouissif à dire les choses
honnêtement. J’adore être comique ! Je voulais être Pierre Richard au
tout début, mais ma géographique physique m’en a empêchée ! J’ai essayé
de sortir des cases, mais néanmoins, j’y suis subordonnée. J’essaie dans
le monde tel qu’il est d’exploser des canevas. J’ai fait commerce de ma
beauté en commençant comme mannequin. Après, dire “vous savez, je suis
un clown et je suis marrante” c’était compliqué parce que je n’avais pas
les attributs du clown dès le départ. Mais je suis un clown déguisé en
fleur, comme dirait la chanson ! (rires).
Etre chanteuse, actrice, écrivaine, réalisatrice… c’est une manière de ne se priver d’aucun plaisir ?
Helena Noguerra : Si c’était de la nourriture on
m’appellerait “boulimique”. Je pense que c’est remplir une angoisse,
cette envie de faire un maximum de choses avant nos funérailles. C’est
la conscience de notre “finitude” qui est grandement ancrée en moi
depuis l’enfance, ce qui crée mon caractère et ma bonne humeur !
(rires), parce que je suis consciente de la chance que j’ai d’avoir une
journée en plus dans ma vie. Et souvent, ce sont des propositions qui
viennent et que je prends comme des cadeaux. C’est prendre la vie du bon
côté.