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De son colossal travail sur les inégalités mondiales, l’économiste américain Branko Milanovic a tiré une courbe résumant les effets des bouleversements économiques du dernier quart de siècle. Tout en prévenant que c’est plus compliqué que ça…

Comme « le Capital au XXIe siècle » de Thomas Piketty, l’ouvrage de Branko Milanovic sur les inégalités mondiales, paru aux États-Unis en 2016, a été un véritable événement. Voici la publication de sa traduction française (1). Ce livre est le fruit d’un énorme travail de collecte et de traitement statistique. Focalisé sur les 25 dernières années, il embrasse deux siècles d’histoire des inégalités économiques.

Tous les habitants de la planète pris en compte

La grande originalité de l’auteur (économiste en chef de la Banque mondiale de 1993 à 2001), c’est d’avoir mis tous les habitants de la planète dans le même panier – riches chinois, pauvres états-uniens, membres des classes moyennes européennes ou paysans africains – et d’avoir mesuré l’évolution de leurs revenus. Ce travail se résume en un graphique devenu célèbre : « la courbe de l’éléphant ». En abscisse (échelle horizontale), la distribution des habitants de la planète en fonction de leurs revenus – les plus pauvres à gauche, les plus riches à droite. En ordonnée (échelle verticale), la progression des revenus moyens par tête hors inflation entre 1988 et 2008 des différents fractiles des revenus mondiaux (des 1 % les plus pauvres aux 1 % les plus riches).

Le résultat donne une silhouette d’éléphant, la trompe en l’air. À l’arrière-train du pachyderme, les plus pauvres ont vu leurs revenus augmenter sur les vingt ans considérés (de 20 % pour les 2 % les plus pauvres, de 20 % à 50 % pour les 30 % les plus pauvres). Mais le plus spectaculaire est la progression enregistrée par ceux dont les revenus sont situés autour de la médiane des revenus mondiaux, entre les 40 % et les 60 % les plus élevés. Ce sont eux qui forment le dos de l’éléphant : leurs revenus ont presque doublé sur vingt ans. Devant lui, ceux dont les revenus sont situés autour des 80-85 % les plus élevés ont vus les leurs stagner. Pour ceux situés au-delà, cela a rebondi : voilà la trompe qui se lève. À son extrémité, les 1 % les plus riches, aux revenus déjà considérables, ont enregistré un gain de 65 %. Plus faibles en pourcentages, ces gains des 1 % les plus riches sont en valeur six fois plus élevés que ceux des personnes dont les revenus sont autour de la médiane.

Que donne à voir cette courbe de l’éléphant, selon l’auteur ? Les gagnants et les perdants de la mondialisation. Un coup de pouce aux plus pauvres, qui le restent néanmoins. L’émergence d’une classe moyenne dans les pays asiatiques en forte croissance comme la Chine, l’Indonésie, le Vietnam ou l’Inde (le dos de l’éléphant). La stagnation des classes moyennes et populaires des anciens pays riches (États-Unis, Europe). L’explosion d’une classe d’ultra-riches dans ces mêmes pays riches. De fait, une courbe qui aide à comprendre la dérive ploutocratique aux États-Unis comme la montée du populisme en Europe.

Moins d’inégalités entre pays

Pour la première fois depuis la révolution industrielle, constate l’économiste, les inégalités mondiales ne sont plus marquées par une hausse des inégalités entre pays. Pourtant celles-ci demeurent plus fortes que celles à l’intérieur des pays – le lieu où l’on naît, où l’on vit, détermine jusqu’aux deux tiers des revenus que l’on est susceptible de gagner durant notre vie. Et ce sont ces inégalités entre pays qui déterminent les flux migratoires. Or, si le capital se déplace librement, ce n’est pas le cas des hommes – le facteur « travail », selon la fonction de production néoclassique. Pour Branko Milanovic, une plus grande liberté des mouvements migratoires contribuerait à réduire ces inégalités entre pays.

On peut y voir un acte de foi dans les capacités régulatrices du marché. Alors que certains cadenassent leurs frontières, c’est aussi une bouffée d’air. Mais l’auteur cherche des solutions dans le cadre d’un « capitalisme raisonnable » et « plus égalitaire ». Et finit par se prendre au piège. Au nom du réalisme et pour tenir compte du niveau d’acceptabilité de chaque pays, il prône pour ces travailleurs migrants des « niveaux de citoyenneté différents », en clair des traitements discriminatoires par rapport aux résidents – ce qui d’ailleurs existe déjà. Et en vient à cautionner – certes avec beaucoup de pincettes – le traitement qui leur est fait dans les pays du Golfe : après tout, c’est mieux que chez eux pour ces travailleurs venus du sous-continent asiatique, et ça contribue à réduire les inégalités. Impossible à suivre… Et en quoi les traitements discriminatoires – que certains vivent comme une concurrence déloyale envers les travailleurs du pays d’accueil – apaisent-ils les tensions ?

Dominique Sicot, l'Humanité

(1) « Inégalités mondiales. Le destin des classes moyennes, les ultra-riches et l’égalité des chances », de Branko Milanovic. Éditions la Découverte, 2019, 288 pages, 22 euros.

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