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Le 25 novembre 2018 des dizaines de milliers de personnes ont manifesté en France contre les violences faites au femmes (photo d'une manifestante à Paris). Pourquoi ?

Le 25 novembre a été décrété par l’ONU Journée internationale pour l’élimination de la violence contre les femmes. Une violence souvent conjugale. Nathalie (*) est l’une des 144 femmes tuées en France en 2015. Survenu après des mois de harcèlement, ce drame illustre la défaillance des pouvoirs publics.

« Aujourd’hui, je me sens enfin libre », la dernière phrase du journal intime de Nathalie est pleine d’espoir. Le lendemain, le 4 avril 2015, elle est assassinée sauvagement. L’histoire commence deux ans et demi auparavant comme une idylle estivale. Nathalie a 45 ans. Cette commerciale cultivée est mère de deux adolescentes. Divorcée, elle mène à Cannes une vie sans histoire. Sur une plage, elle rencontre X. L’ancien CRS y est maître-nageur. Ils se plaisent, se revoient. Il est bel homme, a de la conversation. Elle revit une deuxième jeunesse.

Dès octobre, il lui demande de l’épouser. Prise dans le tourbillon, elle accepte, avant de se raviser sous la pression de la plus âgée de ses filles, qui trouve que tout va trop vite. X est déçu. En décembre, il emmène Nathalie à Rome en week-end, lui sort le grand jeu : un hôtel au-dessus de ses moyens, un restaurant chic… Mais, en plein repas, il lui fait une scène de jalousie. Elle quitte le restaurant, erre dans la ville. Il la suit, la rattrape, s’excuse, lui dit qu’elle est la femme de sa vie. Ils rentrent ensemble.

Cet épisode alerte la jeune femme. Dans les mois qui suivent, la jalousie de son ami devient de plus en plus pesante. À plusieurs reprises, elle décide de mettre fin à leur relation. À chaque fois, il revient à la charge. De plus en plus, elle étouffe dans cette relation à laquelle elle ne parvient pas à mettre fin. Elle n’ose plus en parler à ses amies car elle a honte de ses allers-retours. Elle s’isole.

Quand elle décide d’arrêter pour de bon leur histoire, il commence à la suivre. Où qu’elle aille, il est là. Il n’hésite pas à faire des scènes à ses amis. Une nuit, alors que la fille aînée de Nathalie rentre de soirée, il lit sur sa moto, en bas de leur appartement. Il l’insulte, traite sa mère de traînée… Le lendemain, il lui envoie un mail de 3 pages où il s’épanche sur le mal que Nathalie lui aurait fait… Alarmée, la jeune fille, qui s’était tue pour protéger sa mère, décide de lui en parler. Nathalie porte plainte pour harcèlement – un délit puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende. Rien ne se passe. « Une simple enquête de voisinage aurait pourtant permis de prendre la mesure de l’ampleur des faits », regrette Clémentine Labatut, avocate de la Fédération nationale solidarité femmes (FNSF), partie civile à la demande de la famille de Nathalie, lors du procès.

Quelques semaines plus tard, son appartement est cambriolé. Le butin a de quoi surprendre : seuls ont été volés son ordinateur, son parfum, ses bijoux dont beaucoup de fantaisie, et la tirelire de sa fille. Elle dépose à nouveau plainte, cette fois-ci contre X. Même quand il lui rapporte une partie de ses affaires, « retrouvées », dit-il, « par des amis policiers », il n’est pas interrogé. Lui n’hésite pas à accuser Nathalie de violence et, après une main courante, à se faire accompagner à son domicile à elle pour y récupérer des affaires. « C’était une manière de lui dire : “Tu vois, la police ne te croit pas, elle est de mon côté” », souligne Clémentine Labatut.

Épuisée nerveusement, Nathalie ne sait plus quoi faire. Elle décide d’accepter de le voir, espérant le raisonner. « La peur était son unique moteur, elle voulait que ce harcèlement cesse, avoir enfin la paix. » Après quelques semaines où elle prend avec lui des cafés, elle comprend que cette tentative d’apaisement est vaine. Elle bloque son numéro, ne reçoit plus ses SMS. Dans son journal intime, elle décrit son sentiment de renaissance. Lui n’accepte pas de perdre sa proie. Après avoir campé plusieurs nuits sur le toit de l’immeuble d’en face, il s’introduit dans son appartement pendant qu’elle est au sport… Le 7 septembre 2018, après trois jours de procès, X est condamné par la cour d’assises de Nice à vingt-cinq ans de prison.

déceler la montée en puissance et le phénomène d’emprise

Cette tragique affaire montre l’importance du travail de formation des professionnels afin qu’ils comprennent la gravité des violences psychologiques. En l’absence d’agressions physiques, l’évaluation du danger ne doit pas être négligée. « Quand une femme dit avoir peur, il faut l’entendre ! » insiste Ernestine Ronai, responsable de la mission interministérielle pour la protection des femmes contre les violences. Il est aussi important de ne pas se contenter de prendre les faits isolément. « Les mettre en relation permet de mettre en évidence une montée en puissance inquiétante. » Les menaces de mort, punies par la loi, ne sont parfois pas des propos en l’air. Heureusement, des dispositifs existent. Lancé en 2014, d’abord en Seine-Saint-Denis (département pilote dans la lutte contre les violences faites aux femmes) et maintenant étendu à l’échelle nationale, le téléphone grave danger (TGD), proposé à des femmes particulièrement menacées par leur partenaire, les met en relation immédiate avec la police. D’apparence ordinaire, il est doté d’un numéro préenregistré. Il suffit d’appuyer sur une touche pour que la femme soit mise en relation avec Mondial Assistance, qui passe le relais aux forces de police, en capacité d’intervenir très rapidement. En Seine-Saint-Denis, 282 femmes ont été équipées de cet outil.

la rupture, un moment à haut risque

Plus largement, l’histoire de Nathalie illustre la nécessité de poursuivre la lutte contre les violences conjugales, à l’origine de 123 féminicides en 2016. « Ses proches ont pour cela sollicité la Fédération nationale solidarité femmes (FNSF), qui regroupe les associations d’accompagnement des femmes victimes de violences conjugales afin qu’elle se porte partie civile, explique maître Olivier Giraudo, l’avocat de la famille. La plaidoirie de la fédération permettait aussi de faire comprendre aux jurés les mécanismes de l’emprise. » L’affaire ressemble à un cas d’école. Tout y est : l’auteur qui, au début, a tout du prince charmant, le cycle de la violence (montée de la tension, explosion, lune de miel et enfin inversion de la culpabilité), les allers-retours. « Au début, Nathalie a espéré qu’il allait changer, qu’ils pourraient revivre ce qui ressemblait à une parenthèse enchantée, avant d’être submergée par la peur », détaille maître Labatut. L’assassinat intervient quand la séparation est perçue comme définitive. « Tous les professionnels savent que ce moment est particulièrement dangereux, il est alors primordial d’assurer la protection des femmes », souligne Ernestine Ronai. Sécuriser le départ pour que s’éloigne la peur !

(*) À la demande de la famille de la victime, son prénom a été modifié et le nom de l’assassin n’est pas cité.

Mélanie Mermoz, l'Humanité
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