Cinéma : De chaque instant de Nicolas Philibert
De chaque instant de Nicolas Philibert. Le cinéaste capte avec sa rare sensibilité les premiers pas de jeunes élèves infirmières et infirmiers. Le primat de la parole sur la description brute ouvre à une réalité complexe et riche.
«En civil, c’est différent. Il y a moins le sentiment de domination », dit à un moment un jeune homme. La parole est flottante, en construction. Cette remarque, qui pèse subitement son poids de réel, est faite au fil de l’eau d’un dialogue avec une responsable de formation, à l’issue d’un stage. Nous sommes dans une institution de Montreuil, en région parisienne, qui forme des élèves infirmières et infirmiers. Nous les suivrons sur le même mode, au fil d’un film articulé en trois parties, chacune introduite silencieusement par un cartouche portant un chiffre et un ou deux vers : « 1. Que saisir sinon qui s’échappe » ; « 2. Que voir sinon qui s’obscurcit » ; «3 Que désirer sinon qui meurt,/Sinon qui parle et se déchire ? ».
Le chapitre inaugural pose la première pierre d’une découverte initiatique. Un groupe de jeunes filles et de quelques jeunes gens accomplit ses premiers gestes, entre fous rires et maladresses, prise de tension, exercices cardiaques et entraînements à la piqûre sur des mannequins… la distribution de vêtements se fait sur le même ton léger et recueilli. Les cours insistent sur la déontologie, le respect du malade, le refus...